Gaspar Willmann

février 2021

Temple Magazine

Dans ta pratique, tu mets en place un protocole strict où s’intègrent la photographie, la peinture numérique et la peinture à l’huile. Comment définirais-tu sa construction ?

Gaspar Willmann

Au départ, je suis arrivé aux Beaux-Arts de Lyon avec un dossier peinture, j’avais une vision très romantique de ce qu’étaient la peinture et le peintre. Au fur et à mesure, je me suis rendu compte que je passais bien plus de temps à prendre des photos, les poster sur les réseaux sociaux, qu’à réellement peindre. Je me suis intéressé à ma relation à ces images, et de manière plus générale aux médias, dans le sens de la diffusion et de la circulation d’images. J’ai collecté énormément de documents, des milliards d’images qui étaient à portée de main. J’étais obsédé par tout ce qui était post-internet, des imageries très lisses, caractéristiques des années 2010. Mon retour à la peinture m’a permis de sortir de cette accumulation qui m’obsédait, j’ai essayé de temporiser ce flux par la peinture. Il y a eu une volonté de créer des protocoles définis pour cadrer cette relation au médium peint. Il y a des sujets récurrents et assez génériques comme la nature morte ou les paysages.

C’est une gratuité générique qui peut exister grâce au protocole ; je construis l’image sur Photoshop à partir de mes propres photographies ou de celles trouvées sur internet, je vais assembler toutes ces images entre elles jusqu’à ce que je décide ma peinture numérique terminée. J’exporte ensuite cette image, en constante mutation. Je l’imprime sur des toiles de coton et de lin, puis apporte la touche finale à l’aide de l’huile.

Temple Magazine

C’est par ce protocole que tu arrives à cristalliser cette accumulation d’images et d’itérations possibles ?

Gaspar Willmann

Oui, je ne vais pas forcément suivre les avancées technologiques, le fait de finir à la peinture à l’huile permet de prendre le temps de regarder les choses et souffler un peu. C’est important pour moi qu’une série ait un début et une fin. Ma série Juste une mise au point sur les plus belles images de ma vie est notamment en réaction à des artistes comme Artie Vierkant, qui a énormément compté pour moi, mais dont l’infinité des reproductions a fini par m’épuiser. Paradoxalement, mes toiles sont elles-mêmes reproduites et m’échappent, ce qui produit une boucle assez vaine.

Temple Magazine

Comment as-tu construit ton exposition de fin de résidence à la Cité des Arts et ce principe d’invitation ?

Gaspar Willmann

Pour cette exposition j’ai invité des artistes avec qui j’ai une attache particulière. C’est important pour moi de travailler avec des gens pour qui j’ai une affinité au-delà du travail. Chaque invité exposait un petit objet dans l’idée d’une fin de repas ou d’une fin de soirée.

Temple Magazine

Des objets qui faisaient écho à ton travail exposé ?

Gaspar Willmann

Oui, et aussi de façon très formelle ce qui dénote avec mon interprétation de la nature morte qui est pour moi un temps de mise en pause, de vie immobile, autant symboliquement que dans la manière dont la peinture se produit. Toutes les pièces ont été conçues pour cette exposition hormis French Theory, le donut de Flore Myceck.

Temple Magazine

Comment oscilles-tu entre ta pratique de la peinture et la vidéo ? Est-ce que tu les vois comme une seule et même installation comme ça a pu être le cas pour ton exposition La Petite Mort chez Exo exo ?

Gaspar Willmann

Souvent, quand je me présente je dis que je suis peintre et vidéaste. On peut penser que ce n’est pas entièrement compatible mais ces pratiques se sont construites côte à côte. Dans l’espace d’exposition d’Exo exo ces deux travaux distincts se retrouvent face à face. Je mets beaucoup plus de temps à faire une vidéo, il y a un temps d’écriture, de casting et de montage. Ma pratique de la peinture, au-delà du protocole établi en amont, est plus instinctive, et me permet d’avoir quelque chose de plus libéré. Je scinde toujours ces deux mediums, c’est-à-dire que je ne vais pas faire de projection vidéo sur mes peintures.

Comme tout est construit conjointement, on retrouve dans la vidéo des extraits figés de ma peinture, des fragments d’images et à l’inverse dans certaines peintures des extraits piochés dans les vidéo. Je crée un jeu d’aller-retour entre l’espace physique de la peinture et l’espace plus fantasmé de la vidéo. Dans l’espace d’exposition les toiles servent littéralement de toile de fond pour la vidéo, elles sont aussi très théâtrales d’une certaine manière et agissent comme un arrière-plan. C’est comme au cinéma ou au théâtre où on a cette espèce de pacte avec les spectateurs ; ils acceptent le décor peint, faux, et prennent part au potentiel récit.

Temple Magazine

Dans ton travail vidéo Vous êtes chez vous, il y a cette idée de visite d’un espace et d’interaction. L’interaction, rendre l’expérience de l’exposition en ligne est quelque chose sur lequel tu travailles ?

Gaspar Willmann

Ce sont des choses sur lesquelles je tâtonne en ce moment, notamment la question de rendre l’expérience en ligne un peu plus sensible. Ce n’est pas mon objectif premier non plus, ça ne remplacera jamais l’expérience que l’on peut avoir avec les pièces réelles mais je recherche des solutions notamment sur les moyens de montrer une vidéo sur internet, et la façon dont chacun a une manière différente de consommer ces dernières. Quelle expérience en dégager ? Aussi, je ne veux pas que l’exposition virtuelle soit dans le mimétisme d'un show réel mais qu’il y ait un vrai intérêt. Je vois ça comme le supplément d’un espace physique : les deux doivent fonctionner conjointement.

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Dans ta pratique, tu mets en place un protocole strict où s’intègrent la photographie, la peinture numérique et la peinture à l’huile. Comment définirais-tu sa construction ?

Gaspar Willmann

Au départ, je suis arrivé aux Beaux-Arts de Lyon avec un dossier peinture, j’avais une vision très romantique de ce qu’étaient la peinture et le peintre. Au fur et à mesure, je me suis rendu compte que je passais bien plus de temps à prendre des photos, les poster sur les réseaux sociaux, qu’à réellement peindre. Je me suis intéressé à ma relation à ces images, et de manière plus générale aux médias, dans le sens de la diffusion et de la circulation d’images. J’ai collecté énormément de documents, des milliards d’images qui étaient à portée de main. J’étais obsédé par tout ce qui était post-internet, des imageries très lisses, caractéristiques des années 2010. Mon retour à la peinture m’a permis de sortir de cette accumulation qui m’obsédait, j’ai essayé de temporiser ce flux par la peinture. Il y a eu une volonté de créer des protocoles définis pour cadrer cette relation au médium peint. Il y a des sujets récurrents et assez génériques comme la nature morte ou les paysages.

C’est une gratuité générique qui peut exister grâce au protocole ; je construis l’image sur Photoshop à partir de mes propres photographies ou de celles trouvées sur internet, je vais assembler toutes ces images entre elles jusqu’à ce que je décide ma peinture numérique terminée. J’exporte ensuite cette image, en constante mutation. Je l’imprime sur des toiles de coton et de lin, puis apporte la touche finale à l’aide de l’huile.

Temple Magazine

C’est par ce protocole que tu arrives à cristalliser cette accumulation d’images et d’itérations possibles ?

Gaspar Willmann

Oui, je ne vais pas forcément suivre les avancées technologiques, le fait de finir à la peinture à l’huile permet de prendre le temps de regarder les choses et souffler un peu. C’est important pour moi qu’une série ait un début et une fin. Ma série Juste une mise au point sur les plus belles images de ma vie est notamment en réaction à des artistes comme Artie Vierkant, qui a énormément compté pour moi, mais dont l’infinité des reproductions a fini par m’épuiser. Paradoxalement, mes toiles sont elles-mêmes reproduites et m’échappent, ce qui produit une boucle assez vaine.

Temple Magazine

Comment as-tu construit ton exposition de fin de résidence à la Cité des Arts et ce principe d’invitation ?

Gaspar Willmann

Pour cette exposition j’ai invité des artistes avec qui j’ai une attache particulière. C’est important pour moi de travailler avec des gens pour qui j’ai une affinité au-delà du travail. Chaque invité exposait un petit objet dans l’idée d’une fin de repas ou d’une fin de soirée.

Temple Magazine

Des objets qui faisaient écho à ton travail exposé ?

Gaspar Willmann

Oui, et aussi de façon très formelle ce qui dénote avec mon interprétation de la nature morte qui est pour moi un temps de mise en pause, de vie immobile, autant symboliquement que dans la manière dont la peinture se produit. Toutes les pièces ont été conçues pour cette exposition hormis French Theory, le donut de Flore Myceck.

Temple Magazine

Comment oscilles-tu entre ta pratique de la peinture et la vidéo ? Est-ce que tu les vois comme une seule et même installation comme ça a pu être le cas pour ton exposition La Petite Mort chez Exo exo ?

Gaspar Willmann

Souvent, quand je me présente je dis que je suis peintre et vidéaste. On peut penser que ce n’est pas entièrement compatible mais ces pratiques se sont construites côte à côte. Dans l’espace d’exposition d’Exo exo ces deux travaux distincts se retrouvent face à face. Je mets beaucoup plus de temps à faire une vidéo, il y a un temps d’écriture, de casting et de montage. Ma pratique de la peinture, au-delà du protocole établi en amont, est plus instinctive, et me permet d’avoir quelque chose de plus libéré. Je scinde toujours ces deux mediums, c’est-à-dire que je ne vais pas faire de projection vidéo sur mes peintures.

Comme tout est construit conjointement, on retrouve dans la vidéo des extraits figés de ma peinture, des fragments d’images et à l’inverse dans certaines peintures des extraits piochés dans les vidéo. Je crée un jeu d’aller-retour entre l’espace physique de la peinture et l’espace plus fantasmé de la vidéo. Dans l’espace d’exposition les toiles servent littéralement de toile de fond pour la vidéo, elles sont aussi très théâtrales d’une certaine manière et agissent comme un arrière-plan. C’est comme au cinéma ou au théâtre où on a cette espèce de pacte avec les spectateurs ; ils acceptent le décor peint, faux, et prennent part au potentiel récit.

Temple Magazine

Dans ton travail vidéo Vous êtes chez vous, il y a cette idée de visite d’un espace et d’interaction. L’interaction, rendre l’expérience de l’exposition en ligne est quelque chose sur lequel tu travailles ?

Gaspar Willmann

Ce sont des choses sur lesquelles je tâtonne en ce moment, notamment la question de rendre l’expérience en ligne un peu plus sensible. Ce n’est pas mon objectif premier non plus, ça ne remplacera jamais l’expérience que l’on peut avoir avec les pièces réelles mais je recherche des solutions notamment sur les moyens de montrer une vidéo sur internet, et la façon dont chacun a une manière différente de consommer ces dernières. Quelle expérience en dégager ? Aussi, je ne veux pas que l’exposition virtuelle soit dans le mimétisme d'un show réel mais qu’il y ait un vrai intérêt. Je vois ça comme le supplément d’un espace physique : les deux doivent fonctionner conjointement.

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